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Perceval rêve de devenir chevalier. Il quitte le château de sa mère et se rend à la cour du roi Arthur. Sur son chemin, il est invité dans un étrange château.
Le jeune Perceval rêve de devenir chevalier. Il quitte le château de sa mère, et se rend à la cour du roi Arthur. Il apprend le maniement des armes, venge la reine d'une offense et décide de retourner chez lui. Sur son chemin surgit un bien étrange château ou il est invité à demeurer. Rohmer adapte Chrétien de Troyes et retrouve le jeune Luchini six ans après "Le Genou de Claire".
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" Eric Rohmer a commencé par traduire lui-même — le vieux français est incompréhensible auj
" Eric Rohmer a commencé par traduire lui-même — le vieux français est incompréhensible aujourd’hui — le texte de Chrétien de Troyes. Non pas en français moderne, mais en lui conservant ses tournures médiévales, ses merveilleux imparfaits du subjonctif et même certains mots, moult jolis, que nous comprenons encore peu ou prou. C’est-à-dire que nous n’avons jamais l’impression d’une traduction, mais l’étonnement de comprendre soudain, par miracle, la langue d’autrefois. Comble de bonheur, cette traduction est tout entière en petits vers de huit syllabes — comme l’original. Pour qu’ils aient leur texte bien en bouche, Rohmer a fait répéter ses interprètes pendant six mois — un an pour Fabrice Luchini qui tient le rôle écrasant de Perceval.
Ensuite, Rohmer a demandé à un musicologue, Guy Robert, de retrouver — voire de pasticher — des airs des XIIe et XIIIe siècles. Il fait chanter une partie du texte par un chœur (quelles jolies voix !) qui commente l’action. En même temps, ce chœur joue d’instruments médiévaux dont le son évoque parfois curieusement la musique indienne : guitare sarrazine, rebec, luth, flûte traversière, chalumeau...
(…) Enfin, les décors nous transportent d’emblée dans le plus magique des Moyen Age. Non point celui des miniatures ou des enluminures, mais celui, plus stylisé, qui devait servir de toile de fond aux mystères. Dès le premier chant et la première image, la féerie nous emporte. Sur un tapis vert où sont collées des feuilles de papier découpé, quelques garçons et filles chantent le printemps et Perceval l’ingénu, élevé comme un enfant sauvage dans un château au fond des bois.
(…) Mais tout le film — et c’est là une des constantes de l’œuvre de Rohmer, rappelez-vous, entre autres, La Marquise d’O — parvient à allier dans le même instant l’ironie et l’émotion. Ce qui, par définition, devrait s’exclure. Comme il allie la fraîcheur et la sagesse, la naïveté et la profondeur...
Ce Perceval, dans lequel tous les enfants émerveillés devraient entrer de plain-pied (le Moyen Age est un siècle qui leur ressemble), a la force de l’évidence. Tout est simple, si simple qu’on a un peu honte de vouloir tenter des lectures à d’autres niveaux. Et si on tente ces lectures — psychanalytiques, symboliques, mystiques, — on s’aperçoit qu’avec les yeux de l’enfance on avait déjà tout compris. Quel besoin avons-nous d’aller chercher un symbole érotique dans les trois taches de sang sur la neige (on pense à Andrei Roublev, film de signes lui aussi), qui rappellent à Perceval son amour pour Blanchefleur ? De toute façon, nous avions compris. Et les enfants aussi qui dessinent le visage de leur maîtresse avec trois taches rouges : deux pour les pommettes et une pour la bouche...
(…) « Ce chevalier, sans nul arrêt, Va chevauchant dans la forêt. » Sur son aire de sable, entre trois arbres de métal, Perceval — et nous avec lui — vient de parcourir le plus grand des itinéraires spirituels. Il adorait un Dieu « tout autre » dont la force l’éblouissait. Il a découvert le visage du Christ, du Dieu-Homme, dans la toute faiblesse de l’amour.
"Pucelles aux cheveux de rivière, gentils seigneurs hiératiques, choeurs méditatifs... cette douce geste est lente
"Pucelles aux cheveux de rivière, gentils seigneurs hiératiques, choeurs méditatifs... cette douce geste est lente, dépouillée mais riche d'une traduction poétique de l'ancien français par Rohmer lui-même. Elle s'appuie sur une grande fidélité à la lettre et à l'esprit du Moyen Age, ou du moins à ce XIIe siècle lumineux, qui celait ses trésors et ses fureurs dans les replis de légendes faussement naïves. Une fausse naïveté qui court comme une eau fraîche et ironique dans les pérégrinations de Perceval, incarné par un frêle Luchini débutant aux yeux écarquillés. On peut aujourd'hui trouver le récit un peu longuet, ses décors de carton plus pop que médiévaux, et prendre ses élégances rêveuses pour des affèteries démodées. Mais qu'importe : son charme de vitrail, un peu figé et somnambule, reste inchangé."
Cécile Mury" Dans un cinéma français où l'intimisme et, il faut bien l'avouer, un certain narcissisme sont pain quot
" Dans un cinéma français où l'intimisme et, il faut bien l'avouer, un certain narcissisme sont pain quotidien, des films comme la Marquise d'O et Perceval le Gallois brillent d’un éclat tout à fait insolite. Le premier mérite d’Eric Rohmer est donc celui de nous arracher à nos habitudes, à nos routines de spectateurs. Pour une fois, nous allons trouver dans un film français autre chose qu’une peinture d’un réalisme tatillon, nous allons entrer dans un monde où l’imagination et la fantaisie vont pouvoir vagabonder à leur aise. Loin d’être l’entreprise austère qu’on pourrait croire, Perceval est quelque chose qui ressemblerait à un western dont les bagarres seraient contées brièvement et sans complaisance à l’exploit physique. Comme chez Chrétien de Troyes, qui se contente de noter : « Sachez que la bataille fut longue et ardente», « Longtemps le combat reste inégal. Je vous en décrirais bien les péripéties, si je voulais m'en donner la peine, mais à quoi bon ? »
Un western, oui. En ce que Perceval, comme les plus beaux John Ford est un film-itinéraire. La grande affaire est de s’y rendre d’un point à un autre et l’on sait que Rohmer a voulu un décor à la fois inspiré de l’architecture romane et des « mansions » du théâtre médiéval où ses comédiens effectuent réellement le trajet de quelques mètres qui sépare les différents lieux de l’action, ces quelques mètres figurant des distances évidemment beaucoup plus longues. Un western, en ce qu’il reprend le thème des années d’apprentissage et celui du voyage initiatique qui a charpenté les plus beaux films de Howard Hawks.
(...) Accomplissement qu’Eric Rohmer a voulu célébrer en une manière d’imitation de la passion du Christ qu’on ne trouve pas, on le sait aussi, dans le roman de Chrétien de Troyes, bien que nous y quittions Perceval le jour de Pâques. Mais l’auteur se contente de nous dire qu’il reçut la communion dignement ce jour-là et il est très probable que, s’il eût achevé son œuvre, Chrétien nous eût montré son héros retrouvant son amie Blanchefleur pour une happy-end infiniment moins austère que celle imaginée par Rohmer, laquelle ne manque pas d’être déconcertante pour les mécréants que nous sommes.
Cela dit, il n’y a guère que cette fin qui puisse déconcerter dans Perceval. Le reste n’est que liberté, fantaisie et audace inventive. Liberté du texte, où la troisième personne de narration et la première personne se mêlent le plus harmonieusement du monde, où le français moderne truffé de tournures et de termes archaïques des vers octosyllabiques traduit l’original avec infiniment plus de relief et de couleur que ne l’aurait fait une version en prose écrite en un français rigoureusement contemporain.
Liberté et invention du décor qui rendent compte au plus juste des paysages et des lieux sommairement décrits par Chrétien (« La lande était unie et belle et il n’y avait qu'eux deux ») et dont la stylisation imposée par le travail effectué exclusivement en studio est infiniment préférable aux extérieurs somptueux et aux machines architecturales de type hollywoodien en ce qu’elle se présente comme une sorte de rappel synthétique des moyens de représentation de l’imaginaire dont disposait l’époque romane (miniatures, sculptures et bas- reliefs) que le film ne tente pas d’imiter mais dont les éléments dominants lui servent de structures de base. "
" Dans un roman de 9 000 vers écrit par Chrétien de Troyes vers 1190, Eric Rohmer a conservé la langue qui donne
" Dans un roman de 9 000 vers écrit par Chrétien de Troyes vers 1190, Eric Rohmer a conservé la langue qui donne aux dialogues un singulier humour. Les décors métalliques admirablement stylisés s'opposent aux costumes authentiques. Et c’est comme une sorte d'opéra visuel que ce film sur la naïveté des guerriers et l'érotisme des saints.
Lèpre, famines, guerre, pillages. A cette réalité violente et dure, le Moyen Age oppose un idéal éthique : la chevalerie. Beuverie en campagne, rituel au château. Viol pour les rustaudes, hommage platonique à la dame de rang plus élevé... Simple phénomène de compensation, mais, pour la première fois, la culture échappe à la religion. Elle se confond avec l'idéal d'amour, un amour qui conserve encore quelque chose de mystique : l'inatteignable, le renoncement (il faudra attendre la Renaissance pour réconcilier amour et sensualité). Et c'est cela qui séduit l’auteur de Ma Nuit chez Maud.
Eric Rohmer ne cherche cependant pas à nous imposer de théorie libertine, il montre. La quête initiatique de Perceval le Gallois (niais, soudard, chevalier, pèlerin chrétien par la grâce de trois rencontres féminines) s’efface derrière l'étonnante imagerie du cinéaste : absence de perspective, disproportion du château et des personnages, assymétrie des visages.... Les scènes d'intérieur sont filmées comme une église romane avec ses chapelles et ses absides... "
" Les questions d’un enfant sont souvent plus déroutantes que les problèmes des esprits forts. Perceval est un fil
" Les questions d’un enfant sont souvent plus déroutantes que les problèmes des esprits forts. Perceval est un film enfantin. C'est bien pour ça que nous risquons de le méconnaître. Il est trop simple, d’une simplicité aveuglante.
L’idée de filmer le périple de Perceval dans un studio circulaire, comme une arène ou un cirque, heurte notre souci de vraisemblance. Mais le vraisemblable est un critère adulte. Les enfants se moquent du vraisemblable. Les créateurs aussi — voyez Renoir, Bergman — quoi de plus théâtral que leur cinéma. Nous nous sommes peu à peu habitués à ce que les cinéastes empruntent leurs conventions au théâtre. Or ceux qui ont fait avancer le cinéma depuis une quarantaine d’années (depuis Citizen Kane exactement, en passant par Godard, Resnais, Truffaut et bien sûr Marguerite Duras) sont des romanciers-cinéastes. Ils ont nourri leurs films de conventions romanesques. J'entends encore la voix de Belmondo murmurant dans la nuit de Pierrot le fou : « Chapitre deux. Une surprise-partie chez M. et Mme Expresso... »
Perceval est plus qu’un film romanesque. C’est un retour aux origines du « roman ». Peut-être pour goûter la radieuse fraîcheur de ce premier roman de notre littérature, fallait-il, comme Rohmer, avoir aimé le plus jeune cinéma du monde, celui de Hawks et de Cukor, King Vidor et Hitchcock. L’enfance de l’art cinématographique, c’est Hollywood. Pour rejoindre aujourd’hui les sources du romanesque français, il faut faire un petit détour par l’Amérique. Celle du western, de Charlot, de Stevenson et de Scarface. Le secret du grand cinéma américain, c'est que la convention est soeur d’invention, le symbole du chemin du réel, l’artifice inséparable de la vérité de l’art. C’est un secret de Polichinelle. Renoir, qui justement aimait Polichinelle, l'a toujours su. C'est d’ailleurs pour çà que les Français sauf exception ont si mal compris son cinéma. Il a poursuivi sa vérité dans des montagnes de conventions. Le décor du Carrosse d'or est aussi « faux » que celui de Perceval. Moyennant quoi, des personnages comme Perceval crèvent l’écran. Ils existent.
Qu’est-ce qu’un roman, selon Chrétien de Troyes ? Exactement ce qu'est un western (ou une comédie) pour Howard Hawks. Parler « roman » au XIIe siècle, c’est d’abord employer la langue populaire contre le latin des savants et des clercs. Un western est aussi un film qui parle à tous les peuples et non aux spécialistes (...)
Le « roman », c’est aussi un apprentissage (...) Perceval n'apprend pas la chevalerie comme on devient médecin ou avocat. Il croit —comme nous— que la chevalerie est une « classe » ; or, elle est une morale. Il apprendra donc à oublier ce qu’on lui a mis dans la tête. Sa mère l’a encombré de préceptes, il sait tout, il n’est rien. Il rêve de pouvoir et de gloire. Il croit à un dieu politique et fort, il découvrira un roi pleurnichard et faible. Dans l’arène où Rohmer le fait tourner en rond, Perceval va traverser toutes ces illusions. Il va aussi traverser les femmes, si douces, si belles, sans les aimer vraiment, sans les voir. Emouvant de niaiserie, Perceval fonce, piaffe, caracole avec la fougue de ceux qui copient un modèle. Comme Don Quichotte plus tard, il fait le malin en imitant. II ne regarde rien. Il prend. Il ne connaît ni les autres, ni lui-même, tout perdu dans son rêve grandiose.
Perceval ou la désillusion. De l'homme aliéné à l'homme libre. Du désir de pouvoir à l'innocence. Du dieu terrible au Christ d’amour. De l'or à la neige. Des blasons clinquants à la crucifixion. Du compliqué au simple. De l'esprit de Babel à l’esprit de la Pentecôte.
La fable de Perceval contée par Rohmer est éminemment subversive.
Avec ce film, Rohmer réalise très précisément son « chef-d’œuvre », c’est-à-dire l’accomplissement d’une démarche entreprise dans les Contes moraux et la Marquise d'O. Drôle, paillard, pudique, un peu bêta, sincère et vaillant, Perceval — admirablement campé par Fabrice Luchini — apprend à se laver les yeux (comme Rock Hudson dans le Sport favori de l'homme, de Hawks). Avec lui, nous apprenons à regarder, à aimer et à vivre. "
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