
Cyprien Vial : "Un film de super-héros sans super pouvoirs"
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De l'arrivée au dépôt jusqu'à l'entretien avec l'avocat, Depardon filme l'itinéraire de personnes arrêtées en flagrant délit par la police. Exceptionnel.
Raymond Depardon a eu l'autorisation exceptionnelle de filmer l'itinéraire procédural des personnes arrêtées en flagrant délit par la police de leur arrivée au dépôt jusqu'à l'entretien avec l'avocat. 86 personnes ont été filmées avec le même dispositif de tournage, discret et identique, quatorze d'entre elles seront les héros involontaires du film. Leurs échanges avec les substituts nous offrent en creux un miroir unique de la société française. Et un témoignage rare sur la justice.
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" Une nouvelle fois, Depardon est allé démanger les institutions françaises là où, généralement, elles n'aiment pas beaucoup qu'on les gr
" Une nouvelle fois, Depardon est allé démanger les institutions françaises là où, généralement, elles n'aiment pas beaucoup qu'on les gratte. En l'occurrence dans les soutes de la justice la plus ordinaire, celle des flagrants délits. Après des années d’attente, Depardon a en effet obtenu l'autorisation exceptionnelle de filmer dans le bureau du substitut du procureur de la République de Paris, la fameuse huitième section du Palais de justice. C'est là que la police confie à la justice les personnes interpellées en flagrant délit. C'est là aussi que ces accusés sont soumis à un premier entretien, la procédure préalable, qui décidera de leur sort immédiat : incarcération, remise en liberté, date de la convocation devant un tribunal. C'est dire que cette étape, à la fois zone de transit et gare de triage, est littéralement cruciale. Étant donné cette gravité, on s'attendrait à un minimum de solennité et de respect. C'est pire que minimum, c'est rien du tout : le bureau du substitut du procureur de la République de Paris est un réduit d'une dizaine de mètres carrées où se logent avec peine une table, deux fauteuils, un flic, le prévenu et ledit substitut. Ce n'est pas de la justice en chambre, c'est de la justice en placard.
Mais alors, se dit-on :où se tient Raymond Depardon ? Et aussi son ingénieur du son, Claudine Nougaret ? Et surtout sa grosse caméra 35 mm ? Cette question de place est ici, plus que jamais, déterminante : ce n'est pas simplement une performance physique, c'est surtout un point de vue moral. Il est où Depardon ? Exactement à sa place, à la bonne distance, c'est-à-dire le dos au mur, plaqué à la quatrième cloison de la pièce qu'il rend, comme au théâtre, à la fois transparente et aveugle.
Pourtant ce n'est ni la caméra invisible ni la télésurveillance. D'une part parce que ces images n'ont pas été volées : tous les protagonistes du film, prévenus et substituts, ont donné leur autorisation d'être filmés. D'autre part, et surtout, parce que tout ce qui est filmé et enregistré ne se réduit pas au défilé des petites misères de la comédie humaine.
Il est très important de souligner que, bien au-delà du débat fatigué entre documentaire et fiction, Délits flagrants est en effet un film de cinéma. C'est-à-dire un énorme travail de montage, de choix, de décisions, qui consiste, en toute hésitation, dans la crainte et le tremblement, à mettre en scène le vivant. C'est parce que Depardon les respectent comme personnes que tous les protagonistes surgissent comme des personnages; c'est parce qu'il écoute attentivement leurs conversations qu'on dirait des dialogues de cinéma; c'est parce qu'il est lui-même sans cesse sur la brèche de l'humain que, tout à coup, la vie est un roman. Par cette brèche c'est le monde qui met le pied dans la porte, autant dire une éruption de désirs, tout en séduction et répulsion: cette femme est folle, ce garçon est mignon, ce substitut est un franc pervers, cette autre, une brave fille, dans le fond. D'ailleurs, il arrive un événement surprenant pendant la vision de Délits flagrants : il arrive, bien qu'il n'y ait vraiment pas de quoi, que l'on rie. Par soulagement sans doute. Mais aussi parce que cette entreprise de mise à vif prouve, entre autres choses, que le système judiciaire, comme toutes les grandes machines procédurières, génère lui-même son propre ridicule, qu'il n'a pas besoin d'être exagéré pour être comique.
A l'instar de son titre, Délits flagrants retourne le gant et remet sur l'établi des évidences tellement énormes qu'on avait oublié de les regarder : que le discours psy, ou sa caricature, a tous ses droits et toutes ses aises dans le sein affectueux du discours judiciaire (quand il ne le supplée pas pour donner des raisons au déraisonnable); qu'il y a bien une justice de classe, une justice de race et une justice de génération ; que l'ordre du discours judiciaire est tout autant dans ce qui est dit que dans les manières de dire : au doigt et à l'œil."
"Le Palais de justice se dresse au loin, le plan fixe s’étire pendant plusieurs minutes, puis on pénètre dans ses entrailles, on marche vite
"Le Palais de justice se dresse au loin, le plan fixe s’étire pendant plusieurs minutes, puis on pénètre dans ses entrailles, on marche vite derrière prévenus et gardiens, on se perd, cela dure et, au bout du labyrinthe, la petite pièce où la caméra de Raymond Depardon s’est posée, à distance, face aux protagonistes. Elle a la permission exceptionnelle d’enregistrer, mais sans bouger. Dans le cadre inchangé se succèdent alors celles et ceux pris en flag’ de vol, d’escroquerie, de violence conjugale et autres délits divers. Ils arrivent tout droit du poste de police pour comparaître devant un substitut du procureur chargé de les auditionner, avant d’être présentés à un avocat commis d’office pour une comparution immédiate, ou relâchés en vue d’une audience ultérieure.
(...)
La caméra est là pour capter l’action, et l’action est située tout entière dans cette confrontation verbale, les mots étant désormais leur seule défense possible. Le temps imparti est très bref et les dialogues s’enchaînent sans répit. Une fois entendu, le déféré se lève, le visage disparaît du cadre permis, les mains se tendent pour être ferrées, puis la porte se referme. Le corps est aussitôt remplacé par le suivant, d’un autre âge ou sexe, d’une autre nationalité ou classe sociale. De la femme mûre qui vole dans les grands magasins à celle qui démarre les voitures en raccordant les fils électriques, du mari accusé d’avoir frappé sa femme au petit ado bourgeois qui s’est fait une frayeur en taguant un wagon de la RATP, les réponses et les questions se percutent, elles tentent de se saisir par-delà le fossé du langage qui les sépare, par-delà le mensonge comme seul moyen de sauver sa peau, créant inévitablement des effets plus ou moins tragi-comiques. Mais le sourire devant certaines explications d’une mauvaise foi évidente s’évanouit vite face à leur quotidien dispensé en filigrane : moyens de subsister inexistants, alcoolisme, drogue, prostitution, séropositivité… La menace du suicide se formule soudain dans la bouche d’une prévenue, et le charter se profile nettement pour l’émigré interdit de territoire à plusieurs reprises… Par son "obsession de la durée réelle" et la distance qu’impose le plan-séquence, Raymond Depardon laisse au spectateur un espace de réflexion plutôt rare dans le monde de l’image."
"Quelques minutes. Une quinzaine. Jamais plus. Souvent moins. Avec sa caméra, discrète au point d'en devenir invisible, avec sa pudeur et s
"Quelques minutes. Une quinzaine. Jamais plus. Souvent moins. Avec sa caméra, discrète au point d'en devenir invisible, avec sa pudeur et sa tendresse, qui lui font, à chaque instant, éviter la complaisance, Raymond Depardon filme le face-à-face entre un prévenu surpris en « délit flagrant » et un substitut du procureur. (...)
Coincés par deux mécaniques dont ils sont les jouets : la délinquance à répétition pour l'un, l'application stricte de la loi pour l'autre. Une telle angoisse se dégage de ces vérités bidons, de ces mensonges maladroits et obstinés, que le rire naît, par moments. (..)
C'est un film superbe et généreux. Plus Depardon épure, plus sa vision s'élargit. Dans le bureau étroit des sustituts, c'est toute notre société qui surgit. L'avant-2000. Une cour des Miracles peuplée de solitaires et de clandestins. Comme tous les grands films, Délits flagrants traite du sort de l'homme. Et du sentiment qu'il devrait inspirer à son semblable : la compassion - Pierre Murat (1) Raymond Depardon a filmé, avec leur accord, 86 personnes. Il en a retenu 14, jugées, et qui n'ont pas fait appel. Les noms que l'on entend dans le film ont, bien sûr, été modifiés."
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