
Disparition du critique Jacques Siclier
Il a longtemps été une signature incontournable de la critique française, rédigeant ses notes pour Télérama ou L...
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Un avocat déchu trouve un cadavre chez lui. Sa fille est-elle impliquée ? Simenon adapté par l'auteur du "Corbeau" : un grand classique dominé par l'ogre Raimu.
Hector vit retiré en province depuis que sa femme l'a quitté, voilà 18 ans. Une nuit, une détonation retentit. Hector voit une ombre s'enfuir et découvre un cadavre dans son grenier. Avocat déchu, alcoolique, il comprend que sa fille est peut-être impliquée. Il va devoir se défendre... et la défendre. Simenon adapté par l'auteur du "Corbeau" : un grand classique dominé par la figure de Raimu.
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" Georges Simenon écrivit Les Inconnus dans ta maison à Nieul-sur-Mer, en janvier 1939. Ce n’était pas, loin de là, sa première étude de mœ
" Georges Simenon écrivit Les Inconnus dans ta maison à Nieul-sur-Mer, en janvier 1939. Ce n’était pas, loin de là, sa première étude de mœurs, et l'on ne pouvait être étonné, à l'époque, d’y trouver une vision plutôt noire d’une société de province (l’action du roman se passe à Moulins) brusquement dérangée par un fait divers auquel sont mêlés des jeunes gens de bonne famille. Pas étonné non plus - il y avait toujours eu chez Simenon des relents de xénophobie - que dans le clan de ces jeunes gens se soit glissée une brebis galeuse nommée Ephraïm Luska.
Ce roman fut publié aux éditions Gallimard en octobre 1940. Les dates ont leur importance. On est, alors, au début de l'Occupation, et le cinéma français, déjà séduit par les Maigret, va souvent faire appel aux œuvres de Simenon. Ainsi, le tournage des Inconnus dans la malson débute-t-il le 20 novembre 1941. C'est la onzième production de la société Continental Films, société de droit français mais dépendant financièrement de l’industrie cinématographique allemande, installée à Paris par les Allemands, dirigée par un Allemand, Alfred Greven, lequel s’était associé à l’effort de redressement du cinéma français avec une autorité et selon des choix de sujets qui lui valurent (La Symphonie fantastique exaltant Berlioz, par exemple) les foudres de Goebbels.
Il serait trop long de rappeler la politique ambiguë d’Alfred Greven a la tête de la Continental, dont le réseau de distribution en France avait été constitué par des salles prises à des exploitants juifs. Dans le secteur de la production, on se garda de toute propagande antifrançaise. Pourtant, le film tiré des Inconnus dans la maison de Simenon fut interdit à la Libération comme Le Corbeau d'Henri-Georges Clouzot. Ce n’est pas par hasard. Clouzot était l'auteur du scénario et des dialogues des Inconnus, réalisé par Henri Decoin. Le metteur en scène était célèbre. Le scénariste commençait à l'être avant ses débuts - très remarqués - de réalisateur en 1942, avec L Assassin habite au 21.
L’adaptation de Clouzot est parfaitement fidèle au roman, à ce détail près que la ville où se passe l'histoire n’est nas désignée. Dès le début, la caméra explore le décor des rues noyées de pluie, baignées d’atmosphère humide triste, étouffante. La voix de Pierre Fresnay (qui ne joue pas dans le film) s’élève : « il pleut sur ta ville, et sur les toits qui dégoulinent, et sur les jardins inondés. » Le ton est donné (...)
C’est au cours d’une plaidoirie retentissante, après un procès qui est le grand morceau de bravoure du film, que Loursat démasque le vrai coupable. Tout cela relève d’une tradition de dénonciation des mœurs et de l’hypocrisie bourgeoises, à laquelle Simenon apportait sa pierre. Mais qu’il y ait eu là-dedans un nom à consonances juives, Ephraïm Luska, même dans la foulée du romancier, sonnait, à l’époque, comme une marque d’antisémitisme. Ajoutons que l’attaque lancée par Loursat contre la décadence des mœurs, la responsabilité des adultes dans la déliquescence d’une société qui n’avait rien fait pour la jeunesse, retentissait comme l'apologie des idées nouvelles apportées par la « révolution nationale » de Pétain. Henri Decoin et Clouzot (dont Le Corbeau avait aggravé le cas) eurent des ennuis à la Libération. Ils furent dédouanés, mais, si Le Corbeau, une des œuvres majeures du cinéma français sous l’Occupation, a, depuis longtemps, gagné son procès en appel, on n’a jamais réexaminé les Inconnus dans la maison (...)
Alors ? Alors, il y a l’univers de Simenon pris en charge par Clouzot, qui y reconnaît en partie le sien et affûte les plumes du Corbeau. Il y a le réalisme noir d’Henri Decoin, qui, depuis les années 30, réunissait aussi bien les drames que les comédies légères pour Danielle Darrieux. Il y a une étude de mœurs virulente, où la province, sur les vertus de laquelle s’appuyait l’ordre moral pétainiste, en prend pour son grade et perd son masque de respectabilité sous les coups de boutoir d’un ivrogne. Il y a, à l'abri de la Continental, où la censure française de Vichy ne pouvait nas s’exercer, un pamphlet social d'une grande force, d’une grande tension, et une remarquable adaptation de Simenon. Avec Raimu, monstre sacré, en tête, une interprétation solide, des grands aux seconds rôles et aux silhouettes. Ni plus ni moins, mais c'est déjà beaucoup (...) Quant à Luska, joué par Mouloudji, non, vraiment, il nest pas antipathique. D’ailleurs, Luska, ce fils de petits commerçants, est, comme Manu, fils d'une veuve dans le besoin, victime des jeunes bourgeois et des nantis. Le mal n'est pas de son côté. Vous verrez."
" Le fantastique social, répandu dans les drames caractérisés, comme, aussi, dans l’humble traintrain des existences (mais les traintrains
" Le fantastique social, répandu dans les drames caractérisés, comme, aussi, dans l’humble traintrain des existences (mais les traintrains connaissent aussi les télescopages), on sait que Simenon en est l'exploitant, le prospecteur, l'ogre, le débitant, le caïd. La question reste ouverte, s’il est ou non un écrivain - un écrivain à plume. En tout cas, même s'il rédige ses romans à l'aide d’une cravate écarlate à pois jaune clair, il nous exhibe une foulée qui n’est pas en peau de banquette. Quel as ! Son trente millième bouquin, Les Inconnus dans la maison vient de fournir à trois hommes remarquables, Henri Georges Clouzot, dialoguiste, Henri Decoin, metteur en scène et Raimu, le canevas d'un film à ce point parfait qu'il donnerait presque l'impression du ratage en sens inverse.
Pourquoi ? Parce que le ratage est souvent (pas toujours) porté par un mouvement de désordre, de coulage et, aussi, de traits authentiques, au moins dans la maladresse, et que Les Inconnus attestent, de leur côté, du côté de la réussite, une aisance telle que les efforts qu’ils motivèrent sont totalement absorbés et digérés par une certitude qui ruisselle de source. On ne retrouvera pas, dans Les Inconnus, l'espèce de gothisme quasiment hiératique des premières scènes de La Piste du Nord, ni le miniaturisme glycériné de La Duchesse.
Mais on goûtera, transposée à merveille, la présence de cette prenante buée de vie qu'établissent les décors et que confirment les propos. On y saluera l’agilité d'un récit filmé qui nous promène vers sa propre fin et celle de notre plaisir avec une autorité sans raideur. Comble d'astuce et d'assurance, cette autorité, sans compromettre le destin de l'ouvrage, parvient à nous mettre dans le coup, tout en nous prenant à témoin des mérites du film.
Par exemple, quand intervient la voix d'un récitant... Cette voix nous commente littéralement à l'oreille les décors et les personnages - et là nous retrouvons l’analogie du chantonnement, à nous personnellement adressé, de l’organe des romanciers au ras des phrases imprimées dans la confidence des livres. Et Raimu, le phénoménal Raimu, quand il se lance, aux Assises, dans un laïus en faveur des stades et des vélodromes, il ne tarde pas à nous prouver, par quelque inflexion plus Raimu que nature, qu'il s'en fout bien, des stades, et des vélodromes...
Les Inconnus retracent l'aventure de quelques adolescents dans une ville de province groupés pour des forfaits théoriques. La bande compte une seule fille, la froide Juliette Faber. Elle a pour père l’avocat Raimu. Un des garçons (André Reybaz) devient son amant. On l'arrêtera pour le meurtre d'un homme que les jeunes gens, conduisant une auto volée, blessèrent et ramenèrent et que Juliette Faber hospitalise dans le grenier de sa maison (...) C’est Raimu qui va défendre le jeune Reybaz, accusé d'avoir tiré (...)
Raimu, dans le rôle de cet avocat qui n'a pas plaidé depuis vingt ans, qui marine dans le bourgogne de son vice, sous une poussière d'atomes funèbres, s'est fait une tête imbibée de pinard comme on en voit aux clients de ces débits strictement vinassiers qu’on trouve à Paris. Le nez gonflé, l'œil suant. Aux Assises, ses silences, pendant le défilé des témoins, mille fois plausibles et pourtant, délicieusement fabriqués, laissent présager le réveil du bougre. En effet, retrouvant l'éloquence d'autrefois, il s’embarque dans une démonstration forcenée, mais qui ne fait que frôler la sincérité, de la responsabilité des parents et des éducateurs dans les turpitudes de la jeunesse. Le moraliste Raimu dépeint cette ville « qui compte cent quatre-vingt-deux bistros et quatre...» Le mot est lâché - pour rimer, sans doute, avec « infidèles »... Un des traits de notre époque est, en effet, d’abolir, sur tous les plans, les distances, et d'ingérer avec tranquillité les astres, les mondes, les monstres, les gros mots. Quand Raimu parle, par exemple, de l'amant de sa fille, ces vocables, décapés de la gangue verbaliste qui jusqu’ici les recouvrait dans la tradition juridique et théâtrale de la conversation, assument un étonnant accent de véracité crue. Oui, notre époque est une époque la gueule ouverte de plain-pied...
Maître Raimu mène si rondement son jeu qu’il démasque à la barre l’auteur du crime, ce pauvre petit frisé de Mouloudji, point encore au point tout à fait pour lutter avec le père de Marius.
Tout ce film est d'un humour, d’un velouté, d'une puissance à nous enchanter. Il m'a semblé que, tout au long de la bande, nous parvenait vaguement, par bouffées, des rumeurs lointaines sonneries de clairon, bruits musicalisé du tram, ou même le fredon des âmes voisines derrière l’épaisseur des murailles, et nous devons remercier le compositeur Manuel pour cette forme à la fois discrète et vivace de participation mélodique."
"Les Inconnus dans la maison, sur un scénario de Clouzot, d’après un roman de Simenon marque un tournant dans l'œuvre d'Henri Decoin. Le ré
"Les Inconnus dans la maison, sur un scénario de Clouzot, d’après un roman de Simenon marque un tournant dans l'œuvre d'Henri Decoin. Le réalisateur de Premier rendez-vous y aborde avec Raimu l’étude psychologique, comme il le fera quelques années plus tard avec Danielle Darrieux dans La Vérité sur Bébé Donge.
Raimu, qui devait disparaître quatre ans plus tard y réussit une magistrale création, et son interprétation constitue l’intérêt majeur de l’œuvre. Ce personnage puissant et désespéré, cet avocat déchu, sombré dans l’alcoolisme, est en réalité un aristocrate, dont le mépris solitaire tranche sur la médiocrité égoïste de cette petite bourgeoisie de province. Ses accents douloureux et le courage brutal de son attitude lors du procès, sont ceux d'un homme blessé qui, après avoir été écœuré par la veulerie de ce milieu, accepte à nouveau de croire en la seule valeur du monde : l’amour. Et à travers le couple formé par sa propre fille et un garçon sorti du peuple, il défendra cette valeur.
On retrouve en lui l’attitude que Renoir prêtait déjà au Boïeldieu de La Grande Illusion ; par-dessus une bourgeoisie cupide et sans noblesse, l’aristocratie épuisée tend la main au peuple. Il prendra la relève.
Pourtant, Les Inconnus dans la maison est avant tout un film qui pose le problème de la jeunesse. A ce titre il constitue un Avant le déluge avant la lettre. A la jeunesse assoiffée de vie s'oppose le monde adulte enfermé dans son hypocrisie. Entre les deux, l’avocat qui a proféré la démission au compromis - ou à la lutte - et qui noie son écoeurement dans l’alcool.
Au drame de la jeunesse aux prises avec la vie, Decoin, par l'intermédiaire de Raimu, apporte une réponse positive. Et la générosité qui se dégage de l’ensemble fait beaucoup pardonner à ce film un peu lourd mais, à tout prendre, plus vrai et plus humain que celui de Cayatte."
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