
Paul Driessen : "Je préfère travailler seul"
VIDEO | 2016, 9' | Néerlandais, biberonné aux comics américains, Paul Driessen s'est souvent trouvé par hasard a...
UniversCiné utilise des cookies afin de vous offrir une expérience utilisateur optimale.
En les acceptant vous nous permettez d’améliorer nos services, de mesurer notre audience, de personnaliser votre expérience et vous pourrez bénéficier des fonctionnalités relatives aux réseaux sociaux.
Vous pouvez personnaliser vos choix en cliquant sur « PERSONNALISER » et obtenir davantage d'informations en consultant notre politique de gestion des cookies.
Un roi tyrannique est amoureux d'une jeune bergère. Mais elle aime un petit ramoneur. D'après un conte d'Andersen, un chef-d'oeuvre de l'animation.
Sur le territoire de Takicardie, où le roi impose sa tyrannie, seul un oiseau enjoué et bavard, qui a construit son nid tout près des appartements secrets de Sa Majesté, ose le narguer. Il décide d'aider un couple en fuite : une modeste bergère que le roi veut épouser de force, et le petit ramoneur qu'elle 'aime sincèrement. Une folle poursuite s’engage avec des machines volantes conduites par des policiers moustachus, de mystérieuses créatures couleur de muraille qui espionnent la ville, des tritons motorisés jusqu'au roi, sur son trône électrique flottant... D'après un conte d'Andersen, un chef-d'oeuvre de l'animation, Prix Louis Delluc 1979 # Version restaurée en 2013.
Le lecteur n'est pas installé ?
Pour votre information, la lecture en mode hors-ligne n'est pas compatible avec le système d'exploitation Linux
" En sus de sa splendeur graphique et plastique ligne claire européenne mêlant des références à Chirico ou Magritte , cette œuvre tragiqu
" En sus de sa splendeur graphique et plastique ligne claire européenne mêlant des références à Chirico ou Magritte , cette œuvre tragique et sarcastique conjuguant archaïsme et science-fiction, amour et politique, montre un raffinement et une invention jamais vus dans l’univers des petits mickeys. C’est donc moins un grand film joyeux pour enfants qui pourront être déroutés par la noirceur du propos qu’un trip fou dans un drôle de monde surréaliste où l’émerveillement le dispute à l’angoisse. Un film total. "
Vincent Ostria" Le réalisateur déploie une animation d’une fluidité remarquable, toujours vive et dynamique, dans un ensemble urbain qui mélange les part
" Le réalisateur déploie une animation d’une fluidité remarquable, toujours vive et dynamique, dans un ensemble urbain qui mélange les partis pris anachroniques. La cour royale évoque l’histoire, quand le futur s’impose menaçant sous la forme d’éléments modernes, le plus spectaculaire étant l’humanoïde géant qui inspirera à Brad Bird son mélancolique Géant de fer, qui va détruire la cité et trôner sur les décombres. Des moments de cinéma indémodables.
Parabole sur le pouvoir et l’oppression emblématique des années 70, Le Roi et l’Oiseau dans son montage salle d’1h27 est resplendissant. Sa réussite est d’autant plus flagrante aujourd’hui que ses images ont encore une forte résonance, nourrissant une admiration esthétique immédiate. "
" L'aventure, de Paul Grimault commence en 1930. Dessinateur, il entre aux établissements de publicité Damour, où il fait la connaissance d
" L'aventure, de Paul Grimault commence en 1930. Dessinateur, il entre aux établissements de publicité Damour, où il fait la connaissance de Jean Aurenche, Jean Anouilh et André Sarrut, avec lequel il va fonder, en 1936, la société de production Les Gémeaux. Dans ces années-là, par ses activités au sein du groupe théâtral Octobre, il devient l'ami de Jacques et de Pierre Prévert. Jusqu'en 1939 Les Gémeaux, dont Grimault assure la direction artistique et Sarrut l'administration, se contentent de réaliser des commandes publicitaires. Le dessin animé coûte cher, l'industrie hollywoodienne, avec Walt Disney, domine le marché mondial. En France, les conditions économiques ne sont pas favorables aux entreprises ambitieuses, en ce domaine.
Pourtant, lorsque la guerre éclate, Paul Grimault et l'équipe des Gémeaux travaillent à un petit film d'animation, Go chez les oiseaux, où apparaît un personnage original inventé par le dessinateur. Ce travail, interrompu par la guerre, est repris en 1941, devient les Passagers de la Grande Ourse, court métrage d'une dizaine de minutes et en couleurs, comme tous ceux qui vont suivre. La production américaine n'arrive plus en Europe, occupée.
Les Gémeaux sont alors le seul studio d'animation. Paul Grimault réalise de façon artisanale, mais librement, le Marchand de notes (1942, scénario écrit avec Jean Aurenche) et l'Épouvantail (1943, scénario écrit avec Jean Aurenche et Maurice Blondeau). En 1944, toujours avec le concours de Jean Aurenche et Maurice Blondeau pour le scénario, le Voleur de paratonnerres connaît un grand succès après la libération. En 1946, c'est la Flûte magique, et Roger Leenhardt a participé au scénario.
En 1947, un événement consacre Paul Grimault : le Petit Soldat, tiré, avec Jacques Prévert, d'un conte d'Andersen et dont Joseph Kosma a écrit la musique. Fable populaire, dans le monde des jouets, contre la guerre et les forces mauvaises, triomphe, de l'amour, sur la mort. Au style de Grimault, il fallait, sans doute, pour s'épanouir pleinement, la mythologie de Jacques Prévert. Le Petit Soldat est la réussite éclatante du dessin animé aux mains des poètes.
Aussitôt après, Grimault et Prévert commencent, ensemble, la Bergère et le Ramoneur, d'après un autre conte d'Andersen. L'entreprise a, tout de suite, une importance historique : ce sera le premier film d'animation français de long métrage en couleurs. À cette époque, tout le monde est sûr, chez nous, que Paul Grimault est le seul à pouvoir, concurrencer Disney sans l'imiter, à pouvoir imposer une " école " nationale de l'animation. Malheureusement, de multiples difficultés (tes procédés d'animation demandent beaucoup de temps et d'argent) vont entraîner un différend avec André Sarrut, qui retire peu à peu à Grimault et son équipe leurs moyens de travail.
La Bergère et le Ramoneur est mis en exploitation en 1953, dans une version de soixante-deux minutes désavouée par Grimault et Prévert pour les modifications apportées et qui recevra pourtant un prix au Festival de Venise. C'est la fin d'un espoir, une création inachevée, non conforme. Dès 1951, Paul Grimault avait quitté Les Gémeaux pour fonder sa propre maison de production, Les films Paul Grimault, dont l'activité allait s'exercer dans le film publicitaire et le court métrage.
Mais, en 1967, Paul Grimault récupère les droits et le négatif de la Bergère et le Ramoneur. Il entreprend alors de refaire son vrai film. Il lui faudra douze ans pour y parvenir, et ce sera le Roi et l'Oiseau, long métrage de quatre-vingt-cinq minutes auquel Jacques Prévert travailla jusqu'à sa mort. Aujourd'hui, Paul Grimault ne veut pas revenir sur le conflit qui le sépara d'André Sarrut, refuse la polémique.
La Bergère et le Ramoneur était pour lui un " faux ". Il n'en a gardé qu'une partie, des séquences morcelées correspondant à son projet ; il a pu sauver trois chansons de Joseph Kosma (mort lui aussi). Le Roi et l'Oiseau n'est pas une reconstitution. Pour qu'il n'y ait pas d'équivoque, le titre a été changé.
Au prix d'un énorme travail technique, l'ancien s'est fondu (dessins, animation, couleurs, son) dans le nouveau ; d'autres voix ont été choisies pour les personnages, et le compositeur polonais Wojcieh Kilar a écrit une autre musique. Aboutissement de trente ans de recherches, le Roi et l'Oiseau n'est pas pour autant un film archéologique. Sur le thème du conte d'Andersen, c'est la fusion heureuse, parfaite, de l'imagination, de la pensée de Jacques Prévert et des conceptions graphiques, cinématographiques de Paul Grimault.
Au roi Charles V et Trois font Huit et Huit et Huit font Seize, le tyran de Takicardie, s'oppose un oiseau au plumage étincelant, à la verve caustique et l'esprit anarchiste, défenseur de la liberté. Il y a bien quelques souvenirs de Disney dans le couple un peu trop mièvre des " enfants qui s'aiment ", cette bergère convoitée par le roi et ce petit ramoneur pourchassé, mais, pour le reste, c'est l'apogée d'un style bien personnel. Les dessins, figuratifs, reproduisent la profondeur de champ, l'espace, du cinéma de prises de vues réelles, l'animation très souple donne l'impression de mouvements d'appareil et fait vivre de la même manière les humains et les animaux.
Des décors monumentaux de la cité royale, rêve d'un architecte mégalomane et symbole de puissance, on passe à la ville souterraine où les pauvres croupissent dans l'ombre, ce qui rappelle Metropolis, de Fritz Lang. Un musicien aveugle joue et chante des chansons de lumière et d'espoir, charme les lions qui se révoltent contre le tyran. Le roi bellâtre et cruel, frère du diable des Visiteurs du soir, entouré de policiers moustachus, est vaincu par l'oiseau frondeur, les animaux et les forces populaires, et l'automate géant dont il avait fait une machine d'oppression et de mort sert à sa punition.
La féerie a sa morale, les couleurs expriment des atmosphères, des sentiments, des rapports de force. Le Roi et l'Oiseau est une œuvre accomplie du " réalisme poétique " dans le cinéma d'animation."
" Il s’est passé trente-cinq ans entre le début du travail de Paul Grimault sur La Bergère et le Ramoneur – devenu depuis Le Roi et l’Oisea
" Il s’est passé trente-cinq ans entre le début du travail de Paul Grimault sur La Bergère et le Ramoneur – devenu depuis Le Roi et l’Oiseau – et la sortie au cinéma du film, tel que voulu par le réalisateur.
Il s’est aujourd’hui écoulé presque autant de temps depuis cette sortie : c’est à la faveur d’un rafraîchissement technique que revoici sur les écrans le conte de la bergère, du ramoneur, du roi déterminé à briser leur couple et de l’oiseau qui protège leur amour. D’époque en époque, rien ne change : Le Roi et l’Oiseau est toujours d’une beauté et d’une force qui ne se démentent pas.
En 1949, Paul Grimault travaille pour la première fois avec Jacques Prévert sur Andersen : ce sera Le Petit Soldat, Prix international à Venise en 1948, ex aequo avec Melody Time, de Walt Disney. Le ton est donné : Grimault et ses producteurs, les Gémeaux, vont chercher des noises au studio de Mickey. C’est en collaboration avec les Gémeaux que Prévert et Grimault vont jeter les bases de La Bergère et le Ramoneur, avec une équipe d’une centaine de personne, des moyens colossaux inattendus dont l’ambition ne se cache pas – il faut contester la suprématie américaine. Mais l’ambiance n’est pas au beau fixe entre les producteurs et le réalisateur : celui-ci, avec une bonne partie de son équipe, est renvoyé par les Gémeaux, qui remontent le film à leur guise.
Il est exploité en 1953, précédé d’un carton stipulant clairement que Grimault n’est aucunement en accord avec les choix esthétiques et narratifs opérés par la production sur La Bergère et le Ramoneur.
C’est un échec, et les productions des Gémeaux mettent la clé sous la porte. En 1967, Grimault reprend possession des négatifs et des droits du film : c’est alors que commence un travail de titan. La Bergère et le Ramoneur avait été filmé en Technicolor : les bandes utilisées ont mal vieilli, et il faudra refaire entièrement les séquences que Grimault veut garder (approximativement 40 minutes du film original). Le travail est colossal, d’autant plus que le réalisateur veut réorienter son récit, avec l’aide d’un Jacques Prévert alors très malade : le poète décédera d’ailleurs avant la sortie du Roi et l’Oiseau en 1979 – même si la légende dit qu’il aurait eu le temps de finir son travail sur le film, à quelques jours près.
C’est qu’il aura fallu du travail aux deux hommes pour transposer le conte de Hans Christian Andersen. La différence est simple, et profonde : devant la possibilité de plonger vers la liberté, la bergère du conte est prise de vertige, et abandonne son idée. La bergère du film saute, quant à elle, allègrement le pas : littéralement. Pris au piège sur les toits de l’appartement privé du roi de Takicardie, au plus haut d’une ville gigantesque, ils n’hésitent pas un instant à sauter dans le vide avec une corde lâche comme seule sécurité.
Chez Prévert comme chez Grimault, on n’est pas timide face à la liberté. Mais il ne s’agit plus vraiment de parler d’eux : le temps de la bergère et du ramoneur centre de l’intrigue a vécu – il est à présent temps de parler du roi, et de l’oiseau. L’oiseau, c’est l’absolu de l’amour qui unit les jeunes fugitifs, une figure de l’idéal le plus pur, tandis que le roi n’est que névrose et folie du pouvoir.
À l’image de cette mégalomanie délirante, la ville-royaume de Takicardie est construite tout en hauteur, mélange inharmonieux d’influences et de références architecturales (on aperçoit ainsi le pont des soupirs), comme un symbole d’une tour d’ivoire permettant à un roi perclus d’ennui et de solitude de contempler l’entièreté de son royaume d’un seul coup d’œil. Le tout étant littéralement construit au-dessus d’un monde qui devient dès lors souterrain, évoquant autant les Enfers circulaires de Dante qu’une banlieue grise et éteinte, ou seul un musicien aveugle peut encore se permettre le luxe d’espérer, la grisaille quotidienne lui étant épargnée.
Mais ce roi ennuyé et triste (dont le nom même du royaume, Takicardie, évoque une douleur au cœur), ce roi si nombriliste qu’il louche perpétuellement pour mieux se contempler, ce roi finalement plus pathétique que véritablement malfaisant, n’a qu’un temps : ici, il brise un miroir et, dans le même geste, sa propre image ; plus tard, celle-ci va sortir du tableau pour prendre sa place. L’orgueil et l’arrogance laissent place à un avatar bien plus terrible : la névrose, la folie du pouvoir.
Tout aussi symboliques, la bergère et le ramoneur sortent également, comme le second roi, du cadre d’une peinture. Ils sont irréels par défaut : ce sont, au sens propre, des dessins animés. Comme ils sortent de leur peinture, ils sortent du conte et, ce faisant, gagnent leur liberté. À plusieurs reprises, on leur rappellera la règle des livres de contes de fées : « les rois épousent les bergères, c’est connu » – les rois, pas les « petits ramoneurs de rien du tout ».
« Ce n’est pas tellement le réalisme que j’ai recherché, c’est la réalité des personnages », disait Paul Grimault [1] : le réalisateur avait à cœur de confier lespersonnages de ses films aux animateurs qui pouvaient leur correspondre le mieux. Les deux amoureux sont donc confiés à celui de ses collaborateurs dont Grimault sait qu’il est parfaitement heureux en amour – nul autre ne saurait mieux les animer. D’essence réelle, les personnages restent cependant toujours une illusion : ainsi, lorsque le roi parcourt la ville basse aux commandes de son robot géant – une force mécanique objective – la lumière émanant de ses yeux capture les deux fugitifs. Et voici qu’ils ne sont plus qu’une ombre flageolante, projetée par rien. Tous ne sont, finalement, que chimères, incarnations évanescentes d’idées, d’espoirs et de folies. On pourra certes trouver, occasionnellement, au roi des airs d’Adolf Hitler – se souvenir, à ce sujet, de ses propos à la bergère, qui lui rappelle qu’elle a accepté de l’épouser en échange de la liberté du ramoneur et de l’oiseau : « mais ma chère, ils vont travailler. Et le travail rend libre. ». S’ils ne sont pas les seuls à avoir utilisé ce concept, on se souviendra pourtant que les nazis avaient affiché précisément ces mots, Arbeit macht frei, au frontispice du camp d’Auschwitz. Pourtant, ce symbolisme lourd semble ne pas être du tout en accord avec la personnalité artistique et politique de Grimault – tout au plus s’agit-il de rajouter à l’infamie du roi de Takicardie.
On aurait donc tort de réduire Le Roi et l’Oiseau à sa seule dimension d’allégorie libertaire – le film traitant avant tout de la différence ténue entre l’idéal et la folie. Dans la séquence finale, des pas s’éloignent du lieu atemporel, agéographique, de Takicardie, ne laissant comme épilogue que la dernière émanation de la folie – le robot laissé sans pilote – libérant d’un geste le dernier avatar de l’idéal – l’oisillon perpétuellement pris dans sa cage. Qu’on ne croie pas qu’il s’agisse d’une victoire de ce dernier sur le premier : ce n’est que la compréhension finale, après tant de luttes, d’une symbiose entre les deux, à laquelle on ne peut échapper."
[1] Propos tirés des entretiens réalisés par B. Marié pour le Cinéma français numéro 32 et R. Grelier pour La Revue du cinéma de mars 1980.
Ciné Phil au sujet de
Nos offres d'abonnement
BASIQUE ETUDIANTS
1 | € |
le 1er mois(1) |
SANS ENGAGEMENT puis 4,99€ /mois
Sur présentation d'un justificatif(2)
BASIQUE
1 | € |
le 1er mois(1) |
SANS ENGAGEMENT puis 6,99€ /mois
PREMIUM
9 | ,99€ |
/mois |
SANS ENGAGEMENT
* A l'exception des films signalés
CINÉPHILE
15 | ,99€ |
/mois |
SANS ENGAGEMENT
*A l'exception des films signalés
BASIQUE ETUDIANTS
49 | ,99€ |
/an |
Sur présentation d'un justificatif(2)
BASIQUE
69 | ,99€ |
pour 1 an |
PREMIUM
99 | ,99€ |
pour 1 an |
* A l'exception des films signalés
CINÉPHILE
175 | ,99€ |
pour 1 an |
* A l'exception des films signalés
Vous devrez fournir un justificatif de scolarité (carte étudiante ou certificat, en .pdf ou .jpg).
UniversCiné se réserve le droit d'annuler l'abonnement sans possibilité de remboursement si la pièce
jointe envoyée n'est pas conforme.
Offre valable 12 mois à partir de la date de l'abonnement
_TITLE